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À la rencontre de Vortex, Inc. Née à Lagos, au Nigéria, cette société de contenu créatif et de divertissement est en train de changer le visage de la production de bandes dessinées en Afrique. Grâce à Vortex, la culture africaine trouve un moyen d’expression unique, essentiellement par le biais du langage visuel emblématique de la bande dessinée. Afin d’exalter le continent, Vortex mise sur l’exportation d’histoires africaines créées par des Africains vers un public plus large et publie des récits prenant le ton et les saveurs épicées de la Patrie.

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LEFT TO RIGHT: Page from Mumu Juju, 2015 / 2016. Art and colors by Etubi Onucheyo; Page from Wrath House, art and colors by Chima Kalu. All rights reserved to Vortex, Inc. Image courtesy of Vortex, Inc.

Su Opperman : Qu’est-ce qui vous a conduit vous et votre équipe à créer Vortex, Inc. ?
 
Somto Ajuluchukwu: Vortex, Inc. est né de l’amour de raconter des histoires – des histoires africaines – et de partager notre culture. Ce sont les deux piliers qui soutiennent l’idéologie fondatrice et le pivot de notre société. Vortex est une culture. Son pouvoir d’attraction magnétique a réuni des personnes de même sensibilité et mues par ces deux ambitions. Puis, avec le temps, cet assemblage est devenu le Vortex d’aujourd’hui.
 
Il ne faut pas oublier non plus que Vortex n’est pas une banale société de bande dessinée. Nous avons un côté radical et nous nous livrons volontiers à la critique sociale. Pour nous, la bande dessinée n’est pas qu’un outil narratif. Elle permet aussi d’aborder des questions propres à notre environnement, mais tout aussi pertinentes à l’échelle mondiale. Par exemple, <Sannkofamaan> traite de l’origine de la situation dans le Delta du Niger (Nigéria), Strike Guard aborde des sujets comme la place des cultes dans les institutions supérieures de l’Etat et June XII parle de corruption au sein du gouvernement. Nous faisons tout cela dans le but de transmettre des messages importants à nos jeunes lecteurs et d’éduquer des héros qui combattent des maux bien réels incarnés par les méchants des bandes dessinées.
 
Avez-vous le sentiment que Vortex, Inc. a changé la scène de la bande dessinée nigériane?
 
Je ne dirais pas vraiment “changé”. Je dirais que nous avons largement contribué à l’immense œuvre constituée par le secteur de la bande dessinée. Nous avons commencé par faire les choses différemment et avons osé donner vie à nos personnages de façon plus diversifiée que les bandes dessinées. Nous avons utilisé les personnages principaux de Mumu Juju dans le cadre d’un contenu pédagogique animé sur les états et les capitales, qui a été présenté lors de l’évènement Learn Africa Conference pour Longman Nigeria Plc. Avec notre entrée sur la scène de la bande dessinée, la concurrence est devenue plus rude. Désormais, tous les acteurs du secteur sont au sommet de leur art, en termes de qualité, de régularité et d’engagement, car ils ont vu de quel bois nous nous chauffions et qu’ils ont constaté l’étendue de notre développement – s’appuyant sur la seule initiative – via nos partenariats et parrainages. J’aimerais dire que notre apparition dans ce secteur a été un facteur déterminant de sa transition.
 
Nous sommes aussi intellectuels et directs que nous le voulons sur les sujets que nous abordons. Cela ne nous effraie pas. Cette approche intrépide vis-à-vis de notre contenu nous a donné un avantage distinct sur la concurrence. Nous avons d’ailleurs remarqué que nous commencions à faire des émules dans le secteur de la bande dessinée. En outre, notre vaste réseau de créateurs est un modèle de collaboration comme moteur de croissance pour ce secteur.
 
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Strike Guard, art by Ayodeji Afolabi; Mumu Juju, all images by Etubi Onucheyo. 

Quels sont les obstacles majeurs dans la quête d’un public pour Vortex?
 
Nous avons déjà surmonté un certain nombre de problèmes, tels que la régularité, le sentiment d’identification et la qualité. De même, nous avons développé un lectorat et un public. Je pense que l’un de nos principaux défis désormais consiste à détourner l’attention des lecteurs locaux des produits étrangers. Nous aimerions que les gens se passionnent pour notre univers et nos personnages comme ils le font pour ceux de sociétés américaines ou asiatiques. J’ai conscience que ces sociétés sont énormes par rapport à la nôtre, mais je suis convaincu que dans notre créneau, nous méritons une communauté de fans africains plus grande. Ce sont leurs histoires que nous racontons et nos bandes dessinées sont taillées pour relater notre quotidien africain au plus près. Nous avons déjà constaté une croissance dans le nombre et la régularité de nos lecteurs ces derniers mois. Nous pensons donc que les gens prendront bientôt conscience de cette culture.
 
Les coûts élevés pratiqués dans le secteur des médias imprimés au Nigéria constituent-ils un handicap pour Vortex?
 
Les impressions sont finies maintenant ! Le coût élevé du papier (oui car même le papier est importé) et de l’alimentation électrique font de l’impression un casse-tête pour les sociétés de presse, qui à leur tour donnent la migraine aux éditeurs. Bien que nous ayons enfin reçu notre premier lot d’imprimés de collections multiples, cela a pris bien plus longtemps que prévu. Ces facteurs ont un impact négatif sur la production, mais aussi sur les ventes, puisque nous sommes obligés de vendre les bandes dessinées plus cher, ce qui entraîne une baisse de la demande. Cela est d’autant plus problématique que l’un de nos principaux marchés cibles est essentiellement accessible via des bandes dessinées imprimées.
 
La vérité, c’est que même si nous achetions des imprimantes semi-industrielles, le coût de matériaux tels que le papier et l’encre en feraient un combat économique. Toutefois, nous tenons à remercier nos lecteurs et nos adeptes d’être restés avec nous malgré la hausse de prix et de continuer à acheter nos bandes dessinées. Cela nous touche beaucoup.
 
Vortex regroupe une grande diversité de titres, de Strike Guard à Wrath House, en passant par <June XII> (pour ne citer qu’eux), qui montrent la créativité africaine par le biais d’un réseau transmédia bien établi. Selon vous, quel titre représente le mieux les valeurs que vous voulez transmettre et pourquoi?
 
Je suis heureux que vous voyiez notre mouvement de cette manière. Nous aimons à considérer Vortex comme une plateforme destinée à redéfinir la perception de l’Afrique. Les médias sont des outils puissants de définition des cultures et de la géopolitique. Je ne pense pas que nous ayons déjà fini le travail dans ce domaine, mais si nous travaillons en équipe et restons tournés vers l’avenir, nous nous développerons.
 
Il est difficile d’affirmer si un titre seul exprime l’ensemble de ces éléments. Pour être franc, je ne pense pas que ce soit le cas. Chaque titre possède son approche unique et ce trait particulier qui en font le meilleur. C’est pourquoi l’univers de Vortex est holistique. Aucun titre ne peut aller sans l’autre. Il s’agit d’un entrelacs d’histoires extraordinaires, chacune présentant une facette de notre peuple dont vous n’avez peut-être jamais fait l’expérience. C’est comme si chaque titre était une pièce d’un puzzle bien plus vaste.
 
Vous avez mentionné à un moment que vous désiriez que Vortex, Inc. “devienne une culture.” En tant que directeur artistique, comment définiriez-vous un univers de bande dessinée et quelle serait sa fonction dans notre société actuelle selon-vous ?
 
Si Vortex doit être quoi que ce soit, ce n’est certainement pas quelque chose d’existant. Nous ne sommes pas une version africaine de Marvel, DC, Image ou IDW. Au contraire, nous incarnons une nouvelle vague de contenu ou plutôt de savoir illustré. Tout comme le manga asiatique est diversifié et très ancré dans les mythes et la culture du peuple asiatique, Vortex Comics ne se contente pas d’enseigner les principes moraux de base (toutes les bandes dessinées le font), mais éduque également les lecteurs en matière de culture, de mythes, d’histoire, de société ou de style de vie du continent africain. Mais Vortex, c’est encore bien plus que cela. Nous faisons bien plus que d’invoquer les anciennes divinités.
 
VORTEX TEAM

 

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